François Hollande a dévoilé dimanche le nouveau timbre «Marianne de la jeunesse», inspiré du visage de la militante féministe Inna Shevchenko. Parmi les réactions qui se multipliaient pour saluer ou critiquer ce choix, lundi, un tweet de la leader des Femen est remonté à la surface. «Qu’est-ce qui peut être plus stupide que le ramadan ? Qu’est-ce qui peut être plus moche que cette religion ?», se demande Inna Shevchenko en anglais, le 9 juillet.
Si ces deux phrases étaient à ce moment-là passées inaperçues, elles sont ressorties avec le débat sur le timbre. Aussitôt, Inna Shevchenko est accusée d’islamophobie et de racisme. Sur Twitter, les internautes remarquent notamment qu’après quelques critiques et captures d’écran, le bref message a disparu. Rokhaya Diallo, fondatrice de l’association antiraciste Les Indivisibles, se demande pourquoi il y a si peu de réactions officielles face à cette déclaration et regrette la hiérarchisation des religions qu’Inna Shevchenko effectue.
«Il a été commenté lundi, mais ce tweet date de la semaine dernière», explique l’activiste ukrainienne, jointe par Libération. «J’ai posté ça quand j’ai appris qu’Amina était obligée de faire le ramadan, en prison, comme les autres détenues, alors qu’elle est athée. C’était sous le coup de l’énervement.» Elle dément avoir effacé ce tweet. «Je ne sais pas pourquoi il a disparu, mais je l’assume, raconte-t-elle. Je suis même étonnée que les gens soient surpris. La position des Femen a toujours été la même. Nous sommes un mouvement athée, contre toutes les religions, contre tous leurs principes qui mettent en cause les droits et les libertés des femmes.»
Athées
«Les gens qui me disent que je suis islamophobe, je leur dis non : je ne suis pas islamophobe mais « religiophobe »», argue-t-elle. Lorsqu’on lui demande en quoi le ramadan est contre le droit des femmes, elle explique que c’était en «réaction à ce que subissait Amina».
Les Femen sont souvent accusées, notamment par d’autres féministes, d’être ethnocentristes et racistes. Dans une tribune publiée dans Le Monde le 11 juin, Sara Salem, doctorante à l’Institut des sciences sociales des Pays-Bas, juge ainsi qu’elles incarnent «un féminisme de type néocolonial». «Au lieu de favoriser la prise de conscience des problèmes de genre, elles suscitent l’hostilité d’une société qui ne les voit que comme des étrangères cherchant à imposer leur conception des femmes», écrit-elle.
A ces critiques, les Femen répondent que ce ne sont pas elles qui sont allées en Tunisie, mais Amina qui a voulu rejoindre le mouvement d’elle-même. Si leur actualité est concentrée, depuis trois mois, autour d’un affrontement avec l’islam, ce n’est pas la première religion avec laquelle les militantes entrent en opposition frontale. En août 2012,Inna Shevchenko a dû fuir l’Ukraine après avoir découpé une croix orthodoxe en soutien aux Pussy Riot. En février de cette année, les activistes ont aussi déboulé dans la cathédrale de Notre-Dame pour célébrer la démission du pape et critiquer la position de l’église catholique contre le mariage gay.